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Le libre-échange, svp

posted by: Jean Gagnier on

C’est pas un secret, j’aime le libre-échange. Le nationalisme, pas vraiment. Le nationalisme économique, encore moins. Je me réjouis évidemment de la récente entente de libre-échange entre le Canada et l’Union Européenne.

Je ne rate pas une occasion de semoncer le gouvernement Harper, mais quand il agit bien, je le souligne. Alors voilà, c’est fait: ça a pris presque une décennie, mais je félicite un accomplissement du gouvernement Harper.

J’ai mes réserves. Lorsque j’entend parler de gestion de l’offre, je rechigne. C’est tout le contraire du libre-échange que de vouloir imposer des quotas sur l’importation de certains produits.

Oui, un traité de libre-échange pur nuirait à certains secteurs industriels. Certains emplois québécois disparaîtraient. C’est inévitable, et je le crois, désirable. Rares sont ceux qui, encore, se plaignent que nos vêtements sont fabriqués au Mexique plutôt que d’envoyer nos enfants dans l’industrie du textile. Les emplois non concurrentiels de l’industrie du textile ont été remplacés par une meilleure performance économique de secteurs industriels où le Québec et sa métropole démontrent un avantage compétitif beaucoup plus grand. J’aime mieux une ville vibrante de savoir, de design, de technologies de pointe, plutôt qu’une ville d’usines à textiles protégées au nom de la conservation d’emploi.

L’UPA et acolytes sont donc insatisfaits de devoir compétionner avec un produit, en l’occurence le fromage, subventionné par les gouvernements européens. Soit, je leur donne raison. La solution, pourtant, n’est pas de se cabrer et de refuser ces produits, mais bien d’en arriver à convaincre le Canada d’exiger, dans le cadre d’un traité de libre-échange, que ces subventions soient éliminées afin de véritablement favoriser une économie ouverte et libre. C’est, j’en conviens, une lourde tâche, mais je trouve préférable, lorsque devant une inéquité, de tenter de l’enrayer plutôt que de trouver la façon la plus égoïste de s’en accommoder.

Alors, le libre-échange, on l’attend encore. Mais, comme dit avec raison Paul Wells (en anglais), la moitié d’un pain, c’est mieux que pas de pain du tout. Pour quand, l’autre moitié?

La charte des valeurs québécoises

posted by: Jean Gagnier on

La Charte des valeurs québécoises fait beaucoup jaser de nos jours. Ça s’annonce bien:

Les orientations proposées par le gouvernement ont pour objectif de poursuivre la démarche de séparation des religions et de l’État, entamée il y plus de 50 ans dans le sillage de la Révolution tranquille. Le gouvernement québécois croit qu’il s’agit là de la meilleure façon de répondre au pluralisme religieux dans un État moderne, soucieux de l’égalité de toutes et de tous afin de tisser ensemble, par-delà les différences religieuses, morales ou culturelles de toute personne, un lien civique fort.

Ce passage, je l’aime. Quel magnifique projet, et je n’en demande pas mieux, à part peut-être le changement de “poursuivre la démarche” par “compléter la démarche”. Malheureusement, mon enthousiasme ne survit pas à l’épreuve des faits. Je suis incapable d’endosser ou de rejeter complètement cette charte, la trouvant trop hypocrite pour promouvoir une véritable laïcité étatique, objectif qui justifierait un tel remue-ménage.

En tant qu’humaniste agnostico-athée, je trouve désirables les points suivants.

  1. La liberté absolue de croire n’importe quoi, c’est désirable.
  2. La non-ingérence de l’état dans les affaires religieuses, et vice-versa, c’est désirable.
  3. L’égalité de toutes religions et sectes devant la loi, c’est désirable.
  4. La liberté de mouvement, de travail et d’immigration, autant que possible, c’est désirable.
  5. L’intégration d’un immigrant à sa société d’accueil requérant un effort des deux parties, c’est désirable.
  6. Les valeurs québécoises ne requièrent pas de charte. Elles n’ont rien de plus spécial, et elles ne se distinguent que très peu des valeurs françaises, allemandes, américaines ou finlandaises. Bref: si on a à énoncer et défendre des valeurs, je postule que celles que nous tentons de défendre ne sont aucunement propres à notre province, mais bien plus à notre civilisation.
  7. La laïcité des institutions publiques, c’est désirable.
  8. La laïcité des représentants des institutions publiques, c’est là où le bât blesse. Les codes vestimentaires sont objet courant dans plusieurs professions et institutions, et je refuse de considérer l’expression de la religion d’un individu comme un droit plus important, ou un facteur plus atténuant, que n’importe quelle autre forme d’expression personnelle. Que tu sois sikh ou hipster, je veux que l’état considère ta barbe de la même façon devant un code vestimentaire. Si un individu peut porter un voile à l’intérieur de l’école, j’aurais dû avoir le droit de porter ma casquette des Expos. Je continue à cogiter là-dessus.

Parfait. Maintenant, comparons ces désirs avec la Charte du PQ.

La religion a occupé un rôle fondamental dans l’histoire du Québec ; nous devons protéger cet héritage. C’est pourquoi le gouvernement propose de préserver les éléments emblématiques du patrimoine culturel du Québec, qui témoignent de son parcours historique. Le crucifix de l’Assemblée nationale, la croix du mont Royal ainsi que les éléments toponymiques qui ornent le paysage québécois, tels les noms des municipalités et des écoles, en sont quelques exemples.

Nous souhaitons ainsi assurer la séparation de l’État et des religions ainsi que la neutralité et le caractère laïque de nos institutions, tout en protégeant notre héritage culturel et historique.

Préserver un héritage culturel? C’est bien, j’adore et trouve importante l’histoire. Le savoir, c’est important, et l’étude du passé du religieux du Québec est un enjeu fort intéressant. Pourtant, contrairement au Parti Québécois, je prône le retrait du crucifix de l’Assemblée nationale. Sa qualité d’artefact culturel demeure, et c’est pourquoi j’aimerais que le gouvernement demeure propriétaire de l’objet et le conserve au meilleur de sa capacité. Cependant, je trouve hypocrite et honteux de le conserver à l’Assemblée nationale, seule chambre législative de notre province. Contrairement à la Place Ville-Marie, à la croix du Mont-Royal et aux noms de rue, le crucifix de l’Assemblée nationale se trouve au-dessus du président de l’assemblée politique la plus significative de notre état démocratique, a peu près l’endroit le plus inapproprié dont je puisse concevoir. L’idée n’est pas de renier notre passé, mais bien de le corriger lorsqu’il devient désuet. Un fouet au Capitole à Washington, par exemple, n’aurait pu sa place depuis la présidence de Ulysses Grant, mais pourrait tout de même constituer un artefact méritant conservation. Je trouve le maintien d’un crucifix à l’Assembée nationale complètement inappropriée à la suite d’une démarche de laïcisation de l’état.

Mais encore.

Les personnes travaillant pour l’État devraient s’abstenir de faire la promotion de leurs croyances religieuses dans le cadre de leurs fonctions.

Parfait, je vous suis.

Nous proposons d’interdire le port de signes religieux facilement visibles et ayant un caractère démonstratif pour le personnel de l’État dans l’exercice de ses fonctions. Cet encadrement permettrait de refléter la neutralité de l’État. […]

Néanmoins, dans le cas des cégeps, des universités, des établissements publics de santé ou de services sociaux et des municipalités, le conseil d’administration ou le conseil municipal pourrait adopter une résolution permettant à son personnel de porter de tels signes religieux.

Là, je ne vous suis plus du tout. Peut-être suis-je intransigeant, mais je ne comprend pas le but d’instaurer des mesures laïques universelles pour ensuite permettre à des conseils d’administration de les abolir. De plus, à quoi bon interdire des croix de 10cm si on permet les croix de 3cm? Pourquoi sciemment créer une ambiguïté alors que ce n’est absolument pas nécessaire? Si on interdit des objets religieux visibles, interdisons les tous!

Nous proposons que les services de l’État soient donnés et reçus à visage découvert.

Cette obligation permettrait d’établir la règle générale selon laquelle la prestation des services de l’État s’effectue à visage découvert, tant pour la personne qui donne le service que pour celle qui le reçoit.

Bon, ça, c’est clair, ça a du bon sens, et c’est incontournable. Bravo.

En conclusion, je n’aime pas cette charte. Elle se prétend laïque tout en accomodant particulièrement l’héritage chrétien du Québec, alors que ce n’est pas nécessaire, pas utile, et que ça contrevient à l’esprit d’une charte de laïcité. Au lieu d’une laïcité institutionalisée, nous obtenons un nationalisme exclusif, accordant des passe-droits à sa majorité, la faisant paraître xénophobe, pourtant le contraire de l’esprit d’une telle charte.

Un rendez-vous manqué.

Partisanerie-catastrophe

posted by: Jean Gagnier on

À la suite de l’explosion de Lac-Mégantic, j’ai vu passer ceci sur Facebook. L’auteur, Moïse Marcoux-Chabot, semble y déplorer l’utilisation de l’événement par une économiste conservatrice afin d’encourager le remplacement des trains par les pipelines pour le transport pétrolier, une méthode à son avis moins dangereuse. Il relate ensuite plusieurs éléments de la vie professionelle de l’économiste en question, Diana Furchtgott-Roth, qui pourrait expliquer sa prise de position. Jusque là, ça va. Par contre, il y a lieu de se questionner sur la pertinence de mentionner que le Manhattan Institute for Policy Research, auquel serait affiliée Mme Furchtgott-Roth, est un think-tank libertaire et conservateur opposé aux politiques favorables à l’immigration (ce qui, après quelques recherches, me semble erroné). Comment est-ce que cette prise de position, qui n’est même pas la sienne, changerait-elle la qualité de son discours sur la sécurité relative d’un pipeline par rapport à un train? Promouvoir des idées de gauche n’est pas mal en soi, mais, de grâce, ne nous égarons pas par ces sophismes!

Voici ce que je pense de l’explosion de Lac-Mégantic: c’est dommage, bien sûr, et nous devons nous assurer d’une qualité dans le transport énergétique. À la lumière des récents événements, il est normal et nécessaire de se questionner à ce sujet, et n’importe quelle étude sérieuse à ce sujet mérite étude. Soyons bien clairs, cependant: ce n’est pas le méchant pétrole et notre dépendance à lui qui ont causé cette explosion, pas plus que ce soit un moratoire sur la production de produits pétroliers qui règlera le problème. On n’aura pas d’explosions de train, certes, mais au prix de quoi, une dépression économique encore plus considérable?

Le plus dérangeant dans l’argumentaire de M. Marcoux-Chabot, et surtout de plusieurs de ses commentateurs (beaucoup moins articulés que lui), pourrait bien être l’incapacité à séparer les visions politiques de droite, tout à fait légitimes dans une société de droit, d’un parfum d’illégitimité, d’un côté vendu, de mauvaise foi. Pourtant, la gauche ni la droite n’ont le monopole de la vertu, un droitiste comme un gauchiste peuvent se servir de l’actualité afin de promouvoir leur agenda. C’est d’ailleurs le cas-même de M. Marcoux-Chabot, qui clôt son article en proposant l’énergie éolienne comme alternative à l’utilisation de pipelines pétroliers. C’est aussi le cas de groupes gauchisants, par exemple les partisans du contrôle des armes à feu, lors d’événements d’actualité; pourtant, on leur n’en tient pas rigueur.

Je crois concevable qu’une économiste respectée puisse défendre ses propres opinions, rationelles et songées, bien que de droite. Même si elle est associées à des lobbys pétroliers et libertaires. Je pense la même chose de la gauche: un environnementaliste à l’emploi de Greenpeace ou un syndicaliste à l’emploi de la FTQ, malgré ces affiliations, peut tout à fait être de bonne foi. Personne n’a le monopole de la vertu, et il est malhonnête d’attaquer l’intégrité de gens faisant la promotion de leurs options politiques et économiques lors d’événements d’actualité du simple fait que l’on soit en désaccord avec celles-ci. Bref: si on s’indigne des partisans du pipeline, il faut s’indigner des partisans du remplacement intégrale du pétrole par l’énergie éolienne (qui ne fait de très bons plastiques, soit dit en passant). La partisanerie est utile, mais ne doit pas se fonder sur la haine de l’autre, ou sur la mahonnêteté intellectuelle incapable de faire la part des choses. Voilà ce que je souhaite au Québec: une intégrité intellectuelle dépassant les raccourcis idéologiques paresseux.

L’économie autochtone II

posted by: Jean Gagnier on



Ainsi: une communauté autochtone vivant en terre éloignée, sans accès possible aux services urbains et à l’économie réelle, repliée sur les modes de vie ancestraux, mais en même temps assiégée par la modernité – de la motoneige à l’internet – peut-elle être viable? Et encore: quel avenir envisagent les jeunes autochtones «ordinaires», ceux et celles qu’on n’entend jamais?

(Mario Roy)



L’économie autochtone

posted by: Jean Gagnier on



Nous nous retrouvons ainsi dans la situation où l’on veut assurer aux autochtones un niveau de vie digne de citoyens d’un pays riche, tout en sachant que bon nombre d’entre eux rejettent la plupart des moyens qui permettaient d’atteindre ce même niveau de vie.

Souvent, leurs valeurs sont difficilement compatibles avec le progrès tel qu’on le conçoit dans les sociétés industrielles, qui repose sur la propriété, sur une conception du travail et surtout, sur la transformation de la nature. Même s’il y a des cas de succès économiques autochtones, on n’a pas encore trouvé de modèle généralisable, capable de concilier ces valeurs autochtones avec la création de richesse.

(Alain Dubuc)



Lester B. Pearson en 2012

posted by: Jean Gagnier on

Mon premier ministre favori? Fort probablement.

Nobel: opinions convergentes

posted by: Jean Gagnier on

Quelques opinions d’éminents personnages offrant une position similaire à la mienne.

Paul Wells
Why Nations Fail
Mario Roy